Il a des gens qu’on a envie de remercier pour leur soutien, pour leur amour, leur tendresse, et puis il y a ceux qu’on ne peut remercier vraiment, parce qu’ils sont loin, inaccessibles, ou morts, ce qui, finalement, revient un peu au même...
Mon merci du jour, ou de la nuit plutôt, serait envers Monsieur Pierre Desproges. De quoi flipper, écrire sur Pierre Desproges, c’est comme chanter du Brel, ce sera forcément pâle, banal, voire, lamentable. Et puis tout a été déjà été dit, avec un nombre d’adjectifs qualificatifs inquantifiables. Renaud l’écrit lui-même dans son hommage : « […] j’éprouve, disais-je, l’inconfortable sentiment d’avoir fait preuve d’une audace à la limite de la prétention en ayant accepté de confier à ma frêle et malhabile plume de rendre à la sienne, flamboyante et acidulée, l’hommage qu’elle mérite, si je veux je fais des phrases encore plus longues…
Une bien longue introduction aussi pour dire, que, bref, rien à foutre, je me lance.
Monsieur Desproges me sauve souvent (et je ne suis pas la seule, je pense à toi qui le lit aussi) de ses nuits sans sommeil, de ces moments avec l’envie de se foutre en l’air, et tout le reste avec par la même occasion. Dans ces moments au fond du trou, il est là, drôle, mordant, avec une envie de vivre qui vous prend aux tripes. Oui Desproges rit de la mort, il lui rit au nez même, l’envoyant se faire voir tout en sachant qu’elle rôde là, tout près. Il aime l’humanité, et pourtant garde cette lucidité et cette intelligence, pour tomber dans un désarroi touchant, dans un dépit teinté d’espoir. C’est même pas moi qui le dis, c’est lui…
"J’aime beaucoup l’humanité.
Je ne parle pas du bulletin de l’Amicale de la lutte finale et de ses casquettes Ricard réunies.
Je veux dire le genre humain.
Avec ces faiblesses, sa force, son inépuisable volonté de dépasser les Dieux, ses craintes obscures des Ténèbres, sa peur païenne de la mort, sa tranquille résignation devant le péage de l’autoroute A6 dimanche dernier à 18 heures."
Lire Desproges, c’est comme une baffe dans la gueule, ça remet les idées en place en un rien de temps. Une bonne cuite aussi, mais c’est moins sain. C’est un guide pour garder sa conscience en éveil, pour ne pas tomber dans ces lieux communs, pour éloigner la facilité et la bêtise. Une sorte de gri-gri anti-connerie. A lire, et à relire, surtout, pour ne pas se laisser manger par son petit soi mesquin qui guette, là-bas, le moindre moment de faiblesse pour se laisser aller à la bassesse de nos sentiments et de nos instincts.
Monsieur Desproges, tu me manques, et je ne t’ai même pas connu. J’aimerais, parfois, en ouvrant ton intégrale, découvrir de nouvelles définitions à l’usage de l’élite des biens nantis, ou simplement une petite chronique de la haine ordinaire. Un rêve un peu idiot, en somme, mais qui ferait sûrement bien marrer. Et finalement, c’est surtout pour ça que je te remercie. Me faire éclater de rire, toute seule, dans mon lit, sur la cruauté et l’absurdité de notre monde.
* Musique Come di de Paolo Conte, introduction aux Chroniques de la haine ordinaire, parce que "Voici une émission de radiophonie rien que pour abimer une belle chanson de Paolo Conte en la coupant en deux. Ca s'appelle : Les Chroniques de la haine ordinaire."
Quant à ces féroces soldats, je le dis, ce n'est pas pour cafter, mais y font rien qu'à mugir dans nos campagnes.
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